- November 2024
Comment soutenir et tirer parti du potentiel économique des personnes déplacées de force grâce à l’investissement ? Les investissements axés sur les réfugiés sont un moyen pratique pour mettre en relation des investisseurs et des entreprises qui œuvrent pour améliorer de la vie des réfugiés.
Les réfugiés et leurs hôtes représentent des centaines de millions de personnes marginalisées à travers le monde. Si ces populations sont en mesure de contribuer massivement à la croissance économique de leurs nouvelles communautés, les investissements nécessaires pour accompagner et stimuler cet élan sont toutefois rarement disponibles. C’est à ce niveau que l’investissement axé sur les réfugiés (IAR) a une carte à jouer.
L’investissement axé sur les réfugiés est une nouvelle façon d’impliquer le secteur privé dans l’amélioration des conditions de vie des réfugiés et de leurs communautés d’accueil. Selon certaines estimations, le changement climatique pourrait contraindre jusqu’à un milliard de personnes à migrer d’ici l’an 2050.[1] Même si ces données sont fluctuantes, le nombre de personnes déplacées de force ne devrait cesser d’augmenter à l’avenir. Et si aujourd’hui les donateurs humanitaires traditionnels n’ont pas les moyens de financer tous les besoins qui découlent de ces déplacements massifs, ils ne les auront pas non plus demain. Les financements fournis par les donateurs pour parer aux situations d’extrême urgence ne sont actuellement pas adéquats, et ces migrations nécessitent des investissements soutenus pour favoriser l’intégration sociale et économique.
L’investissement axé sur les réfugiés repose sur des approches ciblées qui tiennent compte des enjeux et des opportunités liés à des populations et des défis sociaux et environnementaux spécifiques. S’appuyant sur ses consultations avec des investisseurs axés sur le genre, et sur les enseignements tirés de ces consultations, le Refugee Investment Network a mis au point le cadre « Refugee Lens » afin d’identifier, de qualifier et de suivre tous les investissements qui améliorent les conditions de vie des réfugiés[2] et de leurs communautés d’accueil au fil du temps. Le mouvement de l’investissement axé sur les réfugiés souhaite attirer des investisseurs à impact social, mais aussi des financements axés sur le développement, des fonds philanthropiques et d’autres instruments financiers dans le cadre d’une approche qui vise à mobiliser tous les capitaux disponibles.
Ouvert à tous les secteurs, à toutes les zones géographiques, à toutes les classes d’actifs et à tous les mécanismes de financement, ce mouvement considère que les réfugiés et les autres personnes déplacées de force sont de véritables acteurs économiques (entrepreneurs, employés, fournisseurs et clients) afin d’offrir une image positive de ces personnes dans le cadre d’un discours focalisé sur les opportunités. Les recherches et les données montrent que les réfugiés et leurs communautés sont en effet employables, consciencieux, solvables, et qu’ils sont aussi, bien sûr, des consommateurs. Ces qualités profitent déjà aux entreprises, aux investisseurs et à leurs partenaires qui savent exploiter leur formidable pouvoir économique.[3] L’investissement axé sur les réfugiés pourrait potentiellement jouer un rôle clé dans la façon dont les communautés concernées par le déplacement renouvellent le paradigme humanitaire, et offrir aux investisseurs les connaissances, les outils et les pratiques nécessaires pour générer des avantages économiques mutuels.
Pour assurer la réussite de ce mouvement, un large éventail de parties prenantes – investisseurs, institutions de financement pour le développement, organisations philanthropiques et autres donateurs, organisations humanitaires, experts en développement et en analyses économiques – doivent unir leurs forces afin de développer, tester et élargir une vision et une approche partagées.
Exemples concrets de mise en œuvre de l’investissement axé sur les réfugiés
Si le concept de l’investissement axé sur les réfugiés peut sembler nouveau, un important travail a déjà été effectué dans ce domaine. Le meilleur moyen pour comprendre ce type de financement dans la pratique est de présenter des exemples et des approches spécifiques :
Refugee Investment Facility
Lancé en septembre 2022, le Refugee Investment Facility (RIF) est une initiative de collaboration entre le Conseil danois pour les réfugiés et iGravity, une société suisse de financement à impact social. Le RIF intervient actuellement en Jordanie, en Ouganda et au Kenya pour accorder des prêts à des entreprises privées qui aident à résoudre les problèmes que rencontrent les réfugiés et leurs communautés d’accueil en matière de moyens de subsistance et d’autosuffisance.
Le RIF a mobilisé 4 millions de dollars dans le cadre de son premier fonds pilote. Ces financements seront répartis entre huit à dix investissements dans deux pays, pour profiter à au moins 27 000 réfugiés et membres des communautés d’accueil. Le RIF fournira pour cela un financement axé sur l’impact social à des entreprises qui obtiennent des résultats tangibles pour les réfugiés et leurs communautés d’accueil, et proposera aux entreprises de son portefeuille une assistance technique en termes d’impact et d’économie. Le RIF a déjà approuvé quatre investissements qui permettent de créer des emplois, soutiennent les moyens de subsistance des populations, renforcent le développement de compétences, et favorisent l’inclusion financière des réfugiés et de leurs communautés d’accueil.
Ces investissements incluent notamment Omia Agribusiness, une entreprise qui fournit des produits, du matériel, et des formations agricoles dans la sous-région du Nil occidental de l’Ouganda. Le prêt accordé par le RIF permet à Omia d’élargir ses opérations à travers ce territoire et de proposer à plus de 10 000 nouveaux réfugiés et membres de la communauté d’accueil des intrants et des formations agricoles, tout en développant un modèle d’entreprise plus inclusif pour les réfugiés afin de soutenir les moyens de subsistance des petits exploitants agricoles et de leurs familles. Cette collaboration ouvre la voie à d’autres investissements privés au sein des communautés concernées par les déplacements forcés, et elle permet également de populariser des pratiques d’investissement afin de garantir un modèle durable à grande échelle.
Acumen
En 2023, Acumen, un investisseur à impact social spécialisé dans la résolution de problèmes liés à la pauvreté, a lancé un projet d’investissement pilote sur trois ans visant à soutenir les petites et moyennes entreprises (PME) dont les employés, fournisseurs et clients sont des personnes déplacées de force. Cette initiative mettra à la disposition de ces entreprises des fonds et un soutien ciblé pour les aider à développer leurs activités. Acumen investira 1,5 million de dollars dans trois à cinq entreprises sociales qui interviennent au sein de communautés affectées par le déplacement, pour profiter à plus de 10 000 personnes déplacées de force et à leurs hôtes. Seront plus particulièrement priorisées : les entreprises agroalimentaires en phase de démarrage et ayant un potentiel développement qui recherchent des capitaux de départ, ainsi que les communautés concernées par le déplacement dans le cadre de leur adaptation au changement climatique. Le premier investissement d’Acumen dans le cadre de cette initiative a été accordé à AquaRech, une entreprise aquacole kényane.
Entre 2008 et 2022, le Kenya a connu une série d’inondations qui ont provoqué le déplacement de plus de 1,4 million de personnes à l’intérieur du pays.[4] AquaRech propose à 2 700 petits pisciculteurs de la région du lac Victoria des aliments pour poisson de grande qualité ainsi qu’un marché qui permet aux producteurs de ressources de mener à bien leurs activités. Un sondage effectué auprès d’un échantillon de ces producteurs a révélé que 90 % d’entre eux avaient constaté une nette amélioration de leurs opérations depuis qu’ils travaillaient avec AquaRech. Les participants citaient notamment une amélioration de la taille et du poids du poisson, de leurs revenus, et des quantités de produits vendus, ainsi qu’une réduction de leurs cycles de production. En proposant des infrastructures adaptées à la pisciculture, AquaRech contribue à renforcer la résilience des communautés face au changement climatique.
Un mouvement qui a le vent en poupe
L’investissement axé sur les réfugiés attire aujourd’hui de plus en plus de fonds, que ce soit dans les marchés émergents ou dans les économies plus développées. Le Refugee Investment Fund de Kiva propose, par exemple, aux institutions de microfinance qui soutiennent les réfugiés un financement par emprunt, tandis que le Social Impact Fund de l’International Rescue Committee Center for Economic Opportunity accorde aux réfugiés des prêts à faible taux d’intérêt. D’autres fonds d’investissement privés comme Launch Capital Partners, Whitestone & Co. Fund IV et Courage Housing sont récemment arrivés sur le marché pour soutenir les réfugiés. On citera aussi l’arrivée de nouveaux fonds d’investissement spécialisés dans les PME, comme l’Impact Newcomer Fund en France et l’Entrepreneurial Refugee Network Refugee Venture Fund au Royaume-Uni.
Défis à relever
Renforcer la capacité des entreprises qui travaillent avec des réfugiés
Alors que l’élaboration de nouveaux mécanismes de financement et la mise en place de collaborations permettent de stimuler l’offre (en proposant un financement approprié), il est tout aussi important de soutenir la demande (en renforçant la capacité des entreprises à impact social à absorber le financement et à l’utiliser pour obtenir l’impact recherché). Beaucoup d’entreprises qui travaillent avec des réfugiés sont de petites structures qui manquent d’expérience en matière d’accès au financement et dont les systèmes ne sont pas en mesure d’analyser l’impact des résultats qu’elles obtiennent. Ces entreprises nécessitent par conséquent une assistance technique, des conseils, un mentorat et un accès à des réseaux.
Analyser l’impact
L’identification de cibles appropriées en matière d’impact social et la mise en place de processus d’analyse efficaces sont des tâches souvent problématiques. Lorsque différents partenaires (organisations humanitaires, investisseurs à impact social et donateurs) se réunissent, il est essentiel d’harmoniser les logiques, les mesures incitatives et les indicateurs de chacun. Un tel processus n’est jamais simple. Les organisations humanitaires adoptent généralement une approche fondée sur les besoins, qui cible les personnes les plus vulnérables, et elles doivent régulièrement présenter à leurs donateurs des rapports sur les résultats et l’impact du financement dont elles bénéficient. Les entreprises à vocation commerciale cherchent, quant à elles, à développer leurs activités et à assurer leur viabilité. Les investisseurs ont également leurs propres indicateurs et exigences, par exemple le remboursement impératif de leurs prêts. Dans ce contexte, des compromis doivent être faits pour trouver le juste équilibre entre les objectifs d’impact social pour les réfugiés et le potentiel de croissance des entreprises. Il s’agit d’un processus délicat et itératif.
Les donateurs humanitaires traditionnels ont souvent besoin de données ventilées par statut migratoire sur les individus qui participent à leurs programmes. Ceci est particulièrement vrai dans le cas des ONG qui œuvrent dans le domaine du déplacement. Malheureusement, peu d’investisseurs et d’entreprises sont en mesure de détailler le statut migratoire de chacun de leurs clients ou fournisseurs qui bénéficient d’un investissement. Et comme l’investissement axé sur les réfugiés est un concept relativement nouveau, l’efficacité et le coût de l’analyse des indicateurs potentiellement complexes que réclament les donateurs traditionnels posent encore problème. Le dialogue sur les indicateurs destinés à mesurer l’impact obtenu auprès des populations déplacées de force doit bien entendu se poursuivre, mais la collecte de ces informations doit toutefois être suffisamment simple pour ne pas faire obstacle aux investissements et à la création de nouvelles voies d’investissement.
Politiques et réglementations des pays d’accueil
Les politiques et réglementations des pays d’accueil peuvent à la fois avoir un impact négatif sur le quotidien et les moyens de subsistance des réfugiés, et représenter un obstacle aux investissements. De nombreux marchés émergents, notamment les pays qui accueillent des réfugiés, appliquent des politiques et des réglementations dissuasives pour les investissements étrangers en termes de fiscalité et de protection (ou plus exactement de « manque de protection ») des investisseurs. En outre, beaucoup de pays qui accueillent des réfugiés les empêchent de travailler, de créer une entreprise, d’accéder à la propriété ou à des services bancaires ou de circuler librement sur leur territoire.
Les pays où les politiques de soutien à l’inclusion économique des réfugiés sont plus progressistes peuvent, quant à eux, présenter d’autres obstacles réglementaires qui empêchent les entreprises appartenant à des réfugiés et celles qui répondent aux besoins de réfugiés d’accéder à des capitaux. En Éthiopie, par exemple, des lois sur les investissements étrangers directs imposent aux réfugiés ont un statut « d’étranger ». Ceux qui souhaitent créer une entreprise sont donc soumis à des exigences spécifiques, comme un apport de 100 000 dollars, une somme beaucoup trop difficile à rassembler dans la grande majorité des cas.
Pour assurer la réussite de l’investissement axé sur les réfugiés, tous ces obstacles politiques et réglementaires doivent impérativement être identifiés et surmontés. En identifiant ces défis, les investisseurs à impact social pourront aider, voire encourager, les gouvernements à mettre en place des réformes politiques et réglementaires capables de stimuler la croissance économique et d’obtenir des résultats sociaux pour les réfugiés et les communautés qui les accueillent.
Autres considérations
Assistance technique
On constate une pénurie de capitaux d’investissement dans les pays émergents, notamment sur le continent africain, et plus particulièrement dans le cas des PME créées et dirigées par des personnes locales. Ce manque de capitaux est encore plus marqué dans les PME intervenant dans des zones marginalisées, appartenant à des réfugiés, répondant aux besoins de populations réfugiées ou employant de nombreux réfugiés. La mise à disposition d’une assistance technique est par conséquent essentielle pour assurer la réussite des investissements axés sur les réfugiés, en amont de l’investissement mais aussi après.
Les grandes entreprises ainsi que les institutions financières qui interviennent à grande échelle ou qui souhaitent intervenir dans des zones qui accueillent d’importantes populations déplacées de force doivent disposer des connaissances, des relations et des pratiques nécessaires pour obtenir l’implication des communautés concernées par les déplacements forcés. Ce type de soutien consultatif ciblé pourra créer un vivier d’entreprises répondant aux critères des investissements axés sur les réfugiés, et attirer de nouveaux capitaux afin d’encourager la participation d’autres entreprises et de développer l’écosystème de l’investissement axé sur les réfugiés. Il fournira aussi une feuille de route pratique pour la mise en place d’un soutien technique par les investisseurs.
Représentation des réfugiés
La représentation et la voix des réfugiés sont des aspects tout aussi importants dans le cadre des investissements et des approches dirigées par le secteur privé que dans celui des programmes humanitaires. Les personnes déplacées doivent être activement impliquées, en capacité d’employés, de clients ou de fournisseurs, à tous les niveaux de l’entreprise, depuis le recrutement, le développement de produits, les stratégies commerciales, les analyses de la performance, les processus de diligence raisonnable, jusqu’à la collecte de données et les évaluations de marché. Il est également essentiel de travailler avec des organisations dirigées par des réfugiés et des organisations qui répondent aux besoins des réfugiés afin de soutenir les programmes d’investissement et d’assistance technique le cas échéant, et d’œuvrer pour assurer la représentation des réfugiés à différents niveaux de direction. On notera toutefois que le vocabulaire du secteur de l’investissement et des processus de diligence raisonnable est particulièrement technique, et qu’il s’agit d’un milieu relativement fermé, notamment aux travailleurs humanitaires et à la plupart des réfugiés. Les personnes chargées de la création d’entreprises dans les communautés concernées par le déplacement doivent par conséquent mettre en place des moyens pratiques pour favoriser l’inclusion et la participation dans ce domaine.
Mieux comprendre et délimiter le cadre de la vulnérabilité climatique
A l’heure où les crises liées au climat s’intensifient, leur impact sur les migrations, la sécurité alimentaire et les risques de conflits ne cesse de s’aggraver. Cette situation augmente naturellement les besoins et la vulnérabilité des populations déplacées ainsi que ceux des communautés qui les accueillent. Dans cette dynamique, la définition du déplacement, la détermination du statut migratoire et l’évaluation de la durée du déplacement peuvent présenter des défis majeurs. Il est par conséquent essentiel d’adopter des approches souples en matière d’investissement pour cibler les zones marginalisées et répondre adéquatement aux défis que rencontrent ces communautés.
Certains modèles économiques qui proposent des solutions pratiques pour améliorer la résilience des communautés face au changement climatique, comme l’irrigation à l’énergie solaire, les programmes d’assurance agricole et l’accès aux marchés, favorisent l’intégration économique des communautés concernées par le déplacement tout en protégeant celles-ci contre les crises à venir. En tenant compte de l’interaction complexe d’éléments comme la vulnérabilité, le climat et les déplacements, les investissements doivent privilégier les solutions qui présentent des avantages économiques immédiats tout en renforçant la résilience.
Recommandations
Les auteurs de cet article invitent les lecteurs qui s’intéressent au financement des réfugiés à participer et à soutenir les étapes et les recommandations suivantes :
- Une communauté de pratiques autour des investissements axés sur les réfugiés
Au vu de l’engouement actuel, partout dans le monde, pour l’investissement axé sur les réfugiés et pour les approches d’investissement connexes, nous pensons qu’il est nécessaire d’établir un leadership éclairé pour la communauté des investisseurs afin de favoriser l’échange d’idées, le recueil et la dissémination d’enseignements et de données, et l’élargissement de l’écosystème global de ces investissements. Nous proposons pour cela la création d’une communauté consacrée aux investissements axés sur les réfugiés qui permettrait aux parties prenantes du monde entier de partager leurs expériences, de répondre à leurs interrogations mutuelles et de mieux comprendre le potentiel prometteur de l’investissement à impact social. Des réunions régionales mettant en relation des partenaires financiers intéressés (par exemple gestionnaires d’actifs, fondations et grandes fortunes) avec des bénéficiaires d’investissements axés sur les réfugiés seraient un bon moyen pour focaliser et élargir ce concept. Par ailleurs, des interventions opportunes, des présentations et des rapports pourraient fournir les données et les preuves nécessaires pour encourager l’investissement des parties susceptibles de s’intéresser à l’investissement axé sur les réfugiés. - Financer et investir de manière créative
Toute innovation financière dans des contextes non éprouvés exige un financement patient et flexible de la part des donateurs. À ce stade de développement précoce, nous pensons que les sources de financement publiques et/ou philanthropiques qui savent faire preuve de patience et d’ouverture d’esprit sont les plus à même de favoriser l’itération, la créativité et l’innovation. Des pionniers s’emploient actuellement à prouver l’impact des investissements sur les populations déplacées de force et analysent le degré de concessionnalité (mise à disposition de capitaux à des conditions favorables) nécessaire. Dans l’idéal, une combinaison de subventions et de capitaux commerciaux à visée lucrative pourrait favoriser la mise en œuvre à grande échelle de ces approches. Nous encourageons tout particulièrement les donateurs et les investisseurs à sortir des sentiers battus et à employer différents types d’instruments financiers et de capitaux générant des rendements financiers et sociaux : subventions, investissements à impact social, capital-investissement ou garanties. Tous les enseignements et toutes les expériences découlant de l’utilisation de ces outils et capitaux devront être partagés afin de soutenir le développement de l’investissement axé sur les réfugiés. - Ouverture d’esprit en matière d’impact et d’indicateurs
Les stratégies d’investissement et les financements reposant exclusivement sur des indicateurs spécifiques liés aux personnes déplacées (comme le nombre d’emplois créés par chaque investissement) risquent de générer des processus de définition et de validation démesurément complexes et chronophages qui peuvent donner lieu à un durcissement des critères d’investissement. Les donateurs et les investisseurs qui interviennent dans d’autres secteurs ont déjà commencé à élargir leur définition de l’impact social, à utiliser des indicateurs plus souples pour mesurer certains éléments comme l’adaptation ou la résilience aux crises, et à adopter une approche territoriale offrant une vision plus large des résultats obtenus. L’adoption d’une évaluation moins rigide de l’impact des investissements sur les personnes déplacées de force permettra aux fonds d’élargir leur portefeuille d’investissements, ce qui, au final, bénéficiera aux personnes déplacées et aux communautés qui les accueillent. C’est pourquoi nous encourageons l’établissement d’un cadre large, mais clairement défini, de l’impact et des mesures qui intègre une gamme d’investissement potentiels dépassant les indicateurs habituels des moyens de subsistance. - Élargir le débat
Face à l’évolution de l’investissement axé sur les réfugiés, nous estimons que le déplacement doit être intégré aux stratégies d’impact dans les marchés émergents, notamment dans certains domaines comme l’agriculture intelligente face au climat, l’utilisation productive de l’énergie ainsi que d’autres secteurs du développement économique. Il est, à nos yeux, essentiel d’élargir la compréhension, les échanges d’idées et l’engagement de toutes les parties prenantes. Pour cela, il faudra créer de nouveaux partenariats, au-delà des organisations humanitaires et multilatérales, en faisant notamment appel au secteur privé, aux investisseurs, aux bailleurs de fonds du climat et aux décideurs politiques. Nous proposons d’introduire la dimension du déplacement dans des forums consacrés à l’investissement et au climat afin de sensibiliser et d’inclure davantage d’acteurs dans ce débat.
Barri Shorey – Responsable principale des programmes pour les réfugiés et les catastrophes, Conrad N. Hilton Foundation
Lauren Post Thomas – Responsable principale des plaidoyers pour les réfugiés et l’eau salubre, Conrad N. Hilton Foundation
Lindsay Camacho – Responsable des partenariats gouvernementaux, Acumen
Kate Montgomery – Directrice, Acumen
Tim Docking – PDG, Refugee Investment Network
Selen Ucak – Responsable de l’entrepreneuriat des réfugiés, Refugee Investment Network
Morten Schacht Högnesen – Directeur, Innovation et programmes et engagement des entreprises, Danish Refugee Council
[1] Institute for Economics & Peace (2020) Ecological Threat Register 2020 https://reliefweb.int/report/world/ecological-threat-register-2020
[2] La définition adoptée par le RLI pour qualifier les « réfugiés » et les « migrants déplacés de force » englobe toutes les personnes contraintes de quitter leur pays (en raison de violences, de persécutions, du changement climatique ou de catastrophes naturelles) ainsi que les personnes déplacées au sein de leur propre pays.
[3] Refugee investment network (2018) Paradigm Shift: How investment can unlock the potential of refugees https://refugeeinvestments.org/resources/paradigm-shift/
[4]Le profil national du Kenya élaboré par l’Internal Displacement Monitoring Centre (IDMC) est disponible sur : www.internal-displacement.org/countries/kenya/
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