Le manque de financements constitue l’un des principaux obstacles à l’organisation des communautés cherchant à se protéger. Souvent, celles-ci comprennent mieux que les personnes extérieures les défis qu’elles pourraient rencontrer et développent des idées innovantes pour les surmonter, mais elles manquent de fonds pour mettre ces idées en pratique.
Les recherches conduites par le Fonds mondial pour l'engagement de la communauté et la résilience (GCERF, Global Community Engagement and Resilience Fund) ont permis d’identifier trois raisons principales pour lesquelles des communautés locales ne parviennent pas à lever des fonds. Premièrement, elles ne disposent pas de réseaux adaptés. Elles ne sont pas suffisamment informées des opportunités de financement ou n’ont pas aisément accès à celles-ci (par exemple, par l’entremise des autorités nationales, des programmes de petits dons mis en place par des agences donatrices ou des organisations non gouvernementales nationales ou internationales). Deuxièmement, même lorsqu’elles sont conscientes de ces opportunités, les communautés locales ne sont souvent pas en mesure de solliciter ces fonds ou ne répondent pas aux critères d’admission. Par exemple, elles ne sont pas enregistrées ; elles ne sont pas en mesure de compléter les cadres logiques et les propositions de budget demandés ; ou elles ne sont pas à-même de réaliser les activités de suivi et d’évaluation généralement requises. Troisièmement, il existe parfois un manque de confiance entre les communautés locales et les bailleurs prospectifs, qu’il s’agisse d’autorités nationales, de donateurs bilatéraux ou d’ONG.
Essayer de manière plus systématique de combler l’écart de financement est tout aussi important que de soutenir une sélection de communautés locales vulnérables. À cette fin, le GCERF agit notamment en faisant participer un éventail de parties prenantes au mécanisme de financement (autorités nationales, société civile, secteur privé et représentants locaux des bailleurs). Ainsi, par exemple, lorsque les autorités élaborent des plans d’action nationaux en vue de prévenir les violences extrémistes, le financement des communautés locales est mis en lumière comme une composante cruciale. De la même manière, les entreprises locales ont été sensibilisées au sujet de la capacité potentielle de leurs investissements à contribuer à la stabilisation des environnements fragiles.
Le GCERF s’emploie spécialement à soutenir les initiatives des communautés locales[1] visant à renforcer la résilience face aux ambitions de l’extrémisme violent. Bien que les liens entre ce phénomène et le déplacement n’aient pas encore été en étudiés de manière exhaustive, la plupart des déplacements observés aujourd’hui dans le monde se déroulent au sein ou en provenance de sociétés accablées par les violences extrémistes. Dans certains cas, le GCERF apporte un appui ciblant directement les communautés déplacées, par exemple les communautés Rohingya au Bangladesh. Mais même si les communautés concernées ne sont pas directement touchées par le déplacement, les enseignements tirés du renforcement de la résilience parmi les communautés exposées aux violences extrémistes peuvent certainement être appliqués aux efforts d’assistance destinés aux populations menacées par le déplacement.
Les initiatives soutenues par le GCERF lors de sa première série d’octroi de subventions (mi-2016) peuvent être classifiées en trois grandes catégories. La première consiste à sensibiliser à l’extrémisme violent, par exemple en travaillant avec les médias locaux. La seconde consiste à mobiliser contre l’extrémisme violent, par exemple en établissant des équipes d’intervention communautaires. Le troisième ensemble d’interventions consiste à fournir des solutions alternatives à l’extrémisme violent, par exemple via la génération de revenus. Il reste toujours d’immenses obstacles à surmonter (tels que le suivi et l’évaluation, la sécurité et le contrôle des frais de gestion pour que la plus grande proportion possible des financements soit affectée aux communautés locales) mais, au bout du compte, les enseignements tirés de cette initiative devraient avoir une portée bien plus large, y compris pour les acteurs qui soutiennent les communautés locales exposées au risque de déplacement.
Khalid Koser k.koser@gcerf.org
Directeur exécutif du Global Community Engagement and Resilience Fund (GCERF)
Amy Cunningham a.cunningham@gcerf.org
Conseillère en chef
La Grande Négociation : plus de fonds pour les organisations locales ? Comme prévu, la « localisation » est sortie grande gagnante des discussions du Sommet humanitaire mondial de mai 2016, la « Grande Négociation » ayant permis d’approuver l’objectif de verser 25 % des financements humanitaires « aussi directement que possible » aux organisations locales et nationales. Vingt-sept ONG internationales ont également signé la nouvelle charte Charter4Change (https://charter4change.org) qui les engage à transférer 20 % de leurs fonds aux ONG nationales d’ici 2018 (et de publier en toute transparence le pourcentage véritable) mais aussi à atténuer l’impact défavorable du recrutement de personnel local au sein des ONG internationales, qui prive les organisations locales de capacités. Ce sommet a également donné l’occasion de lancer NEAR (www.near.ngo), un réseau visant à « refaçonner le système d’aide humanitaire et de développement actuel qui, pour l’heure, fonctionne selon le principe hiérarchique, afin qu’il soit géré et ancré localement et bâti autour de partenariats équitables, dignes et redevables ». Adapté de « Sommet humanitaire mondial : gagnants et perdants », IRIN, 26 mai 2016 |