Les réfugiés irakiens dans des communautés hispanophones de Californie

Il est impératif que les réfugiés reçoivent des orientations culturelles adaptées à la réalité de l’endroit où ils sont réinstallés.

Nombreux sont les réfugiés irakiens réinstallés en Californie qui vivent dans des zones où l’environnement culturel « latino » hispanophone est dominant. S’ils veulent réussir à s’adapter à leur nouvelle vie, ils doivent résoudre les difficultés de l’existence en établissant des relations avec leurs voisins hispanophones (ainsi qu’avec d’autres groupes ethniques) et pas seulement avec leurs voisins anglophones. Le succès de l’intégration exige des individus qu’ils tissent des liens qui dépassent leur propre groupe, et les adultes éprouvent davantage de difficultés à y parvenir que les jeunes qui réussissent rapidement à se faire de nouveaux amis et à apprendre l’espagnol aussi bien que l’anglais.

Au cours des séances d’orientation culturelle qui leur sont données dans des endroits comme Istanbul, les réfugiés apprennent que « même si tout le monde aux États-Unis ne se ressemble pas» la maîtrise de l’anglais reste capitale au succès de leur installation aux États-Unis. À l’arrivée toutefois, ils ont découvert que l’espagnol était tout aussi avantageux pour trouver un emploi et ils ont trouvé frustrant de devoir négocier à la fois avec une communauté hispanophone et avec une communauté anglophone pour trouver un travail.

Tout au début lorsque je suis arrivé ici, je suis allé dans un magasin, pour chercher un travail… je pensais…la Californie, tous les gens ici sont américains, … je cherche un travail, et ils m’ont répondu, « Vous parlez espagnol ? » alors, j’ai dit « mais je vis en Californie, je n’ai pas besoin de l’espagnol ». Il [l’employeur] m’a dit, « pas du tout, ici la première langue c’est l’espagnol ».

Certains adultes plus âgés ont considéré que c’était une perte de temps d’aller aux cours d’anglais alors que tous les autres étudiants étaient hispanophones. Certains d’entre eux se sont plaints de ne pas pouvoir pratiquer l’anglais avec leurs voisins – et étaient incapables de communiquer en espagnol avec eux. Ils ont trouvé particulièrement difficile, non pas les différences culturelles mais le fait d’être économiquement désavantagés sur le marché du travail, à la fois parce qu’ils ne parlaient pas l’anglais couramment mais aussi parce qu’ils ne pouvaient pas se débrouiller en espagnol.

De nombreux jeunes, irakiens en particulier, n’ont pas tardé à découvrir qu’ils avaient beaucoup en commun avec les étudiants hispanophones qui comme eux éprouvaient des difficultés à apprendre l’anglais. Ils reconnaissaient que les Latinos étaient moins conservateurs qu’eux dans leurs comportements en public mais ils ne percevaient pas les différences culturelles entre eux comme insurmontables. Les parents et les adultes plus âgés éprouvaient très clairement davantage de difficultés à s’adapter.

Les agences de réinstallation ont mis à disposition de tous les nouveaux arrivants des séances d’orientation culturelle. Toutefois le degré de fréquentation de ces séances était plutôt faible et elles étaient principalement axées sur des questions pratiques telles que naviguer les agences d’aide sociale, obtenir un permis de conduire, respecter la loi sur l’immigration, ouvrir un compte en banque, etc. La composante culturelle n’était pas très importante et se contentait d’aborder des notions génériques de la « culture américaine » comme par exemple la ponctualité aux rendez-vous, sans toucher à la réalité géographique et sociale de la région. L’agence a donc demandé de l’aide à une université locale en vue d’élaborer un contenu « cultures latinos » pour leur formation. Le facteur déterminant pour créer une orientation plus fortement axée sur la culture s’est avéré d’utiliser des « personnes relais » - un représentant des communautés concernées avec des compétences transculturelles – capable d’agir comme une sorte d’émissaire culturel entre les communautés. D’autres agences peuvent apprendre à partir de cette expérience mais le défi reste tout de même le taux de participation aux formations d’orientation culturelle qui est généralement décevant.

 

Ken Crane kcrane@lasierra.edu
Professeur associé, Département d’histoire, de politique et de sociologie, Université La Sierra https://lasierra.edu/history-politics-and-sociology/

Lisa Fernandez lfer693@lasierra.edu
Étudiante de troisième cycle, Université de l’État de l’Oregon http://liberalarts.oregonstate.edu/slcs/wgss

 

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