Dans le cas des jeunes qui arrivent au Royaume Uni pour demander l’asile, la liberté de mouvement et l’accès à la sécurité sont déterminés par l’État, sa législation et sa pratique institutionnelle. Les tentatives qu’ils font afin de poursuivre leur vie et se construire un avenir sont en porte à faux avec un cadre législatif en matière d’immigration conçu comme punitif afin de décourager la migration et apaiser différents secteurs de l’opinion publique. Il manque, tout particulièrement en ce qui concerne les demandeurs d’asile non accompagnés, des entités politiques capables de les représenter, ce qui les oblige à s’organiser et à se confronter eux-mêmes aux structures de pouvoir. Le groupe Brighter Futures est un groupe de jeunes demandeurs d’asile et de réfugiés non accompagnés qui cherchent à défendre leur propre cause et qui sont unis par la volonté d’améliorer la qualité de vie de leurs pairs en engageant le dialogue avec les décideurs politiques, en remettant en cause – et en modifiant – les politiques qui affectent directement leur existence.
Brighter Futures invite régulièrement des spécialistes des arts créatifs à collaborer avec eux. L’occasion de s’exprimer eux-mêmes permet aux jeunes de communiquer au-delà de leurs réalités quotidiennes et de révéler leurs expériences, leurs idées, leurs craintes ou leurs rêves. Le fait de publier les pensées et les réflexions de ces jeunes, comme c’est le cas dans le cadre d’un récent projet d’écriture créative avec English Pen, est la garantie qu’un récit de l’asile s’appuyant sur une expérience vécue a une portée bien au-delà du projet, et qu’il sert à éclairer les décisions politiques, à sensibiliser l’opinion et à élargir la compréhension que la société a de ‘l’autre’. Ceci est particulièrement important lorsque les décisions politiques et les services sont façonnés par des gens qui n’en subiront pas les conséquences au moment de leur mise en application. Les membres de Brighter Futures sont encouragés à débattre farouchement à l’intérieur de cet environnement sûr que fournit le groupe. Ils s’écoutent mutuellement, et cherchent à trouver des solutions pratiques à leurs problèmes, à réfléchir à la manière dont ils pourraient provoquer des petits changements qui pourraient avoir des effets considérables, et aux moyens d’engager le dialogue avec les preneurs de décisions et les prestataires de services qu’ils se sentent souvent impuissants à remettre en question.
Comprendre que les traumatismes du passé continuent d’avoir un impact à titre individuel est crucial. Tout en menant une recherche participative, le groupe Brighter Futures a visité d’autres groupes de jeunes réfugiés pour rassembler des informations sur leurs expériences des services sociaux. Cependant, le recours au terme ‘entretien’, a signifié que certains des jeunes des autres groupes n’ont pas souhaité prendre part aux discussions par crainte de subir à nouveau un ‘entretien’ comme ceux du Home Office [Ministère de l’intérieur britannique] – un épisode pénible du processus d’asile au cours duquel le récit des jeunes demandeurs d’asile est entièrement passé au crible. De même, des processus qui, sans réelle nécessité, obligent les jeunes à revisiter des traumatismes passés et les exposent en pleine lumière, sans autre raison que d’engranger de la sympathie en faveur d’un résultat politique déterminé par d’autres, peuvent avoir pour conséquence de les priver de leur action politique.
En cherchant à établir des ponts avec des fonctionnaires ou d’autres personnes, les dynamiques de pouvoir devraient être nivelées et se fonder sur l’humanité commune plutôt qu’être issues du poste du représentant gouvernemental ou se baser sur le statut migratoire du jeune en question. Cela ne peut se produire qu’à travers une approche qui se fonde sur le vécu – en donnant de la légitimité aux expériences que les participants ont du déplacement. C’est en se forgeant des opportunités qui confèrent de l’expression et de la validité à leurs perspectives que les jeunes sont capables de se tailler une place à partir de laquelle ils peuvent remettre en question les normes de leur réalité quotidienne. Ils peuvent alors se réapproprier leur pouvoir en tant que jeunes : pleins de colère face à l’injustice, fiers de leur héritage et remplis d’espoir face à leurs futurs incertains.
IL EST UN ENDROIT (extrait) Par un membre du groupe de jeunes ‘Brighter Futures’
Il est un endroit où tu peux commencer à vivre où ton premier meilleur ami te fait rire pour la toute première fois… il est un banc sur lequel tu fais ton tout premier rêve d’avenir. |
Alex Sutton, Directeur général adjoint de Praxis Community Projects (Alex.Sutton@praxis.org.uk), et Trupti Magecha, Animatrice principale de Brighter Futures (kushdigital@googlemail.com), dirigent le groupe de jeunes ‘Brighter Futures’ (brighterfutures@praxis.org.uk). Shamser Sinha, Maître de conférence en sociologie à l’University Campus Suffolk (S.Sinha@ucs.ac.uk) et Les Back, Professeur de sociologie à Goldsmiths College (l.back@gold.ac.uk) sont les auteurs du rapport A door to the future? the consequences for young migrants of immigration and welfare policy [Une porte sur l’avenir ? les conséquences de la politique sociale et de l’immigration sur les jeunes migrants] http://tinyurl.com/eumargins-uk-national-policy dans le cadre d’une étude de recherche de l’UE intitulée ‘EU Margins: On the Margins of the European Community’ [Les marges de l’UE : aux marges de la Communauté européenne].