Enfance captive

Les États devraient élaborer des alternatives à la détention d'immigration pour s'assurer que les enfants sont libres de vivre dans un milieu communautaire à travers la résolution de leur statut d'immigration.

Les enfants ne devraient pas être détenus pour cause de migration ou d’immigration. Il existe des solutions alternatives et le réseau International Development Coalition[1](IDC) a développé un modèle pour prévenir la détention des enfants immigrés, en s’appuyant sur trois principes fondamentaux : les enfants qui sont des réfugiés, des demandeurs d’asile ou des migrants clandestins sont, avant tout et par-dessus tout, des enfants ; l’intérêt supérieur de l’enfant doit être le souci primordial dans toute action prise à l’égard d’un enfant ; et la liberté de l’enfant est un droit humain fondamental. Ces principes déplacent le centre d’intérêt depuis le droit de l’État de détenir des enfants vers le droit de l’enfant réfugié, demandeur d’asile ou migrant clandestin, de ne pas se voir privé de sa liberté uniquement pour satisfaire la volonté de l’État de contrôler la migration.

L’IDC a mis sur pied un modèle d’évaluation de la communauté et de placement adapté à l’enfant (Child-sensitive Community Assessment and Placement - CCAP) qui fournit aux gouvernements, aux ONG et autres parties prenantes un modèle schéma d’aide à la prise de décision pour éviter la détention.

 

Étape 1: Prévention

L’étape 1, part d’un parti pris contre la détention des enfants qui intervient antérieurement à l’arrivée sur le territoire nationale de tout enfant qu’il soit réfugié, demandeur d’asile ou migrant clandestin.

 

Étape 2: Évaluation et renvoi du cas

L’étape 2, évaluation et renvoi du cas, intervient dans les quelques heures qui suivent la découverte d’un enfant à la frontière, ou sur le territoire national. Cette étape inclut un passage au crible de tous les individus dans le but de déterminer leur âge, l’assignation d’un gardien ou tuteur pour les enfants non-accompagnés ou séparés de leur famille, l’assignation d’un travailleur social aux enfants qui voyagent avec leur famille, une évaluation initiale des circonstances de l’enfant et/ou de la famille, une évaluation des points forts et des besoins et finalement le placement de l’enfant ou de la famille au sein de la communauté.

 

Étape 3: Gestion et traitement

L’étape 3 constitue l’élément substantiel du modèle d’évaluation et de placement adapté à l’enfant. Cela implique ‘la gestion du cas’, et notamment l’étude des options de migration disponibles aux enfants et aux familles, une détermination basée sur ‘l’intérêt supérieur’ de l’enfant, et une évaluation des besoins en termes de protection des enfants et/ou de leurs familles.

 

Étape 4: Révision et protection

L’étape 4 implique d’assurer le respect des droits des enfants et de leur intérêt supérieur. Cela inclut une révision juridique des décisions déjà prises concernant les enfants et leurs familles – y compris des décisions concernant l’endroit où ils sont installés ainsi que leur statut légal. Cette étape prévoit également une occasion pour l’État de revoir les conditions attachées au placement de l’enfant ou de la famille au sein de la communauté suite à une décision définitive par rapport à leur statut d’immigration.

 

Étape 5: Résolution du cas

L’étape 5 consiste en la mise en œuvre de solutions d’immigration durables.

Les études menées au niveau international démontrent qu’avec un soutien adapté à la gestion de leurs cas, les demandeurs d’asile et les migrants clandestins sont beaucoup plus susceptibles de respecter les décisions relatives à leur statut. En outre, ils réagissent mieux et vivent mieux leur retour ou leur intégration s’ils ont été soutenus à travers l’ensemble du processus de migration et qu’ils y ont gagné en autonomie. Établir une relation de confiance, respecter et valoriser chaque personne en tant qu’individu digne, avec des compétences, des droits et des besoins est fondamental dans le cadre de ce processus. Garantir un soutien qui soit à la fois réaliste, durable et cohérent, et faire également preuve de compassion au cours de la période pendant laquelle l’individu attend une décision finale est absolument essentiel. Ces conditions sont valables pour les adultes, et plus crucialement encore pour les enfants. Le modèle en cinq étapes d’évaluation et de placement adapté aux enfants tient compte des intérêts de l’État de contrôler la migration tout en reconnaissant qu’il n’est jamais dans l’intérêt de l’enfant de le détenir.

“Certains [parmi les autres enfants en détention] devenaient vraiment fous et je me souviens qu’à deux occasions, lorsque j’y étais, il y en a eu deux qui ont essayé de mettre fin à leurs jours. Juste pour sortir de prison…J’avais l’habitude d’aller dans ma chambre pour pleurer et éviter de parler à quiconque. J’avais l’impression que je ne sortirais jamais”. Grace du Sud-Soudan, détenue en Israël, âgée de 15 ans.

 

 

David Corlett corlett.d@gmail.com est Chargé d’étude adjoint au Swinburne Institute www.sisr.net, il a également participé aux recherches et a dirigé (avec Grant Mitchell, Lucy Bowring et Jeroen Van Hove) la rédaction du rapport d’IDC Captured Childhood disponible en ligne sur http://idcoalition.org/ccap/



[1] International Detention Coalition (IDC) est un réseau de la société civile établi à Melbourne en Australie qui compte 300 affiliés, des ONG, des groupes religieux, des universitaires, des praticiens et des individus qui travaillent dans 50 pays à travers le monde.  http://idcoalition.org

 

 

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