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Avant-propos – Bâtir une infrastructure numérique responsable
  • Jessica Bither et Jassin Irscheid
  • May 2024

Les technologies numériques transforment le vécu et la gestion de la mobilité humaine par-delà les frontières. Ce numéro permet de comprendre comment les technologies modifient les processus de gestion des déplacements de populations à travers le monde : de la modélisation prédictive à l’anticipation des migrations climatiques, de la collecte de données biométriques dans des contextes humanitaires aux expériences des demandeurs d’asile utilisant l’application CBP One au Mexique, de l’utilisation des données mobiles par les autorités néerlandaises et allemandes aux opportunités et aux défis de l’économie des plateformes numériques. Ces exemples illustrent la nature souvent ambivalente de la technologie et l’importance du contexte et de la nuance pour comprendre ce qu’elle implique.

Nous sommes à la croisée des chemins. Les choix portant sur les valeurs et les dispositifs de protection que nous intégrons à l’architecture numérique émergente s’opèrent maintenant. La façon dont la mobilité humaine est intégrée aux réglementations naissantes sur les technologies, telles que la réglementation de l’IA (intelligence artificielle) ou de l’IPN (infrastructure publique numérique), déterminera notre gestion des risques majeurs en lien avec la sécurité, la confidentialité et le contrôle démocratique. Il existe aussi la possibilité de biais algorithmiques ou de perpétuation d’inégalités existantes, du racisme et d’autres formes de discrimination structurelle via les systèmes automatisés.

Si elle est conçue de manière responsable, l’infrastructure numérique régissant la mobilité humaine pourra jeter les bases d’un meilleur système, adapté aux réalités d’aujourd’hui en matière de déplacements et de migrations. Elle servira également de base à des outils plus flexibles et adaptables, qui pourront répondre rapidement à l’évolution des règles et des besoins. Par exemple, la numérisation des processus d’attribution de visas pourrait permettre de faciliter l’incorporation de nouveaux critères, de répondre à des évolutions de la demande en termes d’emplois, ou de s’adapter à des catastrophes ou des crises soudaines.

Chez Robert Bosch Stiftung, les technologies numériques et la migration constituent l’un de nos principaux domaines d’étude. Nous travaillons en étroite collaboration avec des acteurs clés et des partenaires pour répondre à la question suivante : comment utiliser les technologies numériques de manière responsable dans les domaines de la migration et du déplacement ? La réponse doit nécessairement comporter des limites à ne pas franchir lorsque les risques sont trop grands. Elle doit indiquer clairement le but ou la motivation du déploiement et de l’utilisation des technologies numériques. Enfin, elle doit évaluer d’un œil critique les personnes qui décident des règles qui régissent ces technologies. Cela signifie également qu’il faut considérer la disruption numérique comme un moyen de transformer les anciennes façons de penser ou les approches obsolètes qui ne correspondent plus à la gestion de la mobilité humaine dans un monde en constante évolution.

Nous espérons que ce numéro contribuera à bâtir une communauté investie dans ces questions majeures et qu’il nous rapprochera d’une réponse sur ce que devrait et pourrait être une approche des technologies numériques responsable et centrée sur l’humain dans le domaine des migrations et des déplacements.

Jessica Bither, experte principale pour la technologie et les migrations
Jassin Irscheid, chef de projet pour les migrations
The Robert Bosch Stiftung GmbH, Berlin, Allemagne

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