Le téléphone satellite au secours des réfugiés

Le premier appel téléphonique est arrivé à 4h30, un beau matin de 2006. C’était l’été – habituellement la période la plus intensive pour ce qui est des accostages de migrants sur les côtes italiennes. Ils étaient en difficulté en mer au milieu de la Méditerranée et lançaient des appels à l’aide. La femme érythréenne qui a reçu cet appel, et qui avait émigré en Italie quelques années auparavant, n’avait aucune idée de comment ces gens avaient reçu son numéro de téléphone. Et malgré la possibilité que son action soit considérée comme de l’assistance ou de la complicité en vue d’une immigration illégale, elle a immédiatement appelé la police locale et l’a informée de ce qui se passait. La police a contacté les garde-côtes qui se sont assuré que le bateau atteignait en toute sécurité l’ile de Lampedusa. Après cet événement, elle a continué à recevoir des appels téléphoniques de migrants se trouvant en mer et les garde-côtes ont toujours répondu. La dernière fois qu’elle a été contactée par un appel à l’aide, c’était en novembre 2009, mais cette fois le bateau n’est jamais arrivé.

Mussie Zerai, un prêtre érythréen qui vit à Rome, a reçu des appels téléphoniques similaires. Les migrants qui le contactaient étaient initialement des Ethiopiens et des Erythréens vivant en Italie, mais à partir de 2002 il a commencé à recevoir des appels téléphoniques directement depuis les bateaux en train de traverser la mer. Bien que les Erythréens ne fassent généralement pas confiance au téléphone pour les communications confidentielles, il est fondamental pour la diaspora érythréenne en cas d’urgence. Fin 2010, Mussie Zerai a commencé à recevoir des appels de réfugiés habitant en Europe dont des membres de famille avaient été enlevés dans la zone du Sinaï et qui recevaient des demandes de rançon allant jusqu’à 8 000 USD par personne.1 Ceux qui recevaient ces demandes lui ont passé les numéros de téléphone de leurs parents, ce qui lui a permis de parler directement avec les migrants kidnappés. Fort de ces témoignages directs, le Père Mussie a non seulement apporté son soutien aux familles mais il  a aussi fait campagne à travers son organisation, l’Agence Habeshia2, pour obtenir de  l’Union Européenne et d’autres organisations la création de ‘couloirs humanitaires’ et l’augmentation des dispositions prévues pour la réinstallation de façon à éviter qu’un nombre encore plus important de réfugiés ne prennent de tels risques.

 

Virginia Signorini (virginia.signorini@yahoo.it) travaille depuis 2005 comme Assistante sociale dans le cadre du Système italien de protection pour les demandeurs d’asile et les réfugiés (www.serviziocentrale.it). Elle est doctorante à l’université de Trieste.


1 Voir: ‘Réfugiés africains en Israël’ dans RMF37 www.fmreview.org/non-state/Furst-Nichols-Jacobsen.html

 

 

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