Justice transitionnelle et personnes déplacées

Une fois qu’un conflit violent a pris fin, mais avant que l’on puisse affirmer que la paix, la sécurité et la stabilité ont été restaurées, il se déroule généralement une période de transition au cours de laquelle un certain nombre de défis étroitement liés doivent être surmontés. Dans le but d’aider à franchir ces obstacles, les mécanismes de justice transitionnelle ne portent pas uniquement sur les aspects juridiques de la justice mais aussi sur ses aspects moraux, politiques et sociaux. Ils se composent de nombreuses mesures, telles que les suivantes : poursuites criminelles ; programmes de réparation ; différents types de réforme institutionnelle, y compris des secteurs de la sécurité et de la justice ; mesures de justice traditionnelle et de justice réparatrice ; amnisties ; commémorations ; et programmes de reconstruction physique. Une approche holistique de la justice transitionnelle cherchera à reconnaître les victimes, encourager la confiance civique et promouvoir les possibilités en matière de paix et de réconciliation.

En divisant les groupes tant sur le plan social que géographique, les conflits entraînent le déplacement des populations loin de leur maison et de leur communauté. Ce déplacement constitue un élément important du contexte dans lequel opère généralement la justice transitionnelle et pourtant, il n’occupe qu’une place secondaire dans la littérature ou les pratiques relatives à la justice transitionnelle. La re-création d’une identité nationale ne peut se faire sans le retour des citoyens déplacés tandis que la réintégration efficace des personnes déplacées est particulièrement cruciale au ré-établissement de sociétés pluralistes.

Alors que les problématiques en jeu sont d’une grande envergure et d’une incroyable complexité, les mesures de justice transitionnelle n’ont souvent disposé que de capacités limitées pour surmonter les nombreux défis que rencontrent les populations déplacées et pour impliquer ces populations dans les mesures elles-mêmes. Pourtant, la viabilité des nations, des sociétés et des communautés qui émergent de conflits violents et recherchent activement la stabilité est directement liée à la viabilité des solutions apportées aux personnes déplacées. Pour remédier au déplacement, il n’est pas forcément nécessaire de beaucoup élargir le programme de la justice transitionnelle, même si celui-ci s’est traditionnellement limité aux institutions à l’intérieur des frontières nationales.  Toutefois, il semble primordial de faire attention à la manière dont les mesures de justice transitionnelle sont mises en œuvre et dont les praticiens de la justice transitionnelle s’engagent auprès des personnes déplacées, traitent leurs réclamations juridiques et se situent vis-à-vis des autres acteurs dont le travail porte aussi sur le déplacement.

Dans les cas des personnes déplacées de l’intérieur (PDI), il existe une obligation indéniable de permettre aux citoyens de participer aux processus politiques ou autres. Toutefois, en théorie comme en pratique, l’engagement des réfugiés (et des autres migrants) est une affaire plus compliquée, et il semble que les tentatives de concrétiser cet engagement aient été peu nombreuses. Les réfugiés eux-mêmes peuvent être réticents à s’engager pour des raisons telles que la peur de s’exposer ou le manque de confiance dans l’avancée du processus  ou le processus lui-même.

  • Quels facteurs incitent et quels facteurs dissuadent les personnes déplacées à s’engager dans les mécanismes de justice transitionnelle ?
  • Quels facteurs incitent et quels facteurs dissuadent les acteurs de la justice transitionnelle - autochtones et externes - à engager les personnes déplacées ?
  • Quelles sont les principales causes de préoccupation des personnes déplacées vis-à-vis de la justice transitionnelle ?
  • Quels sont les principaux obstacles pour garantir le succès des processus de justice transitionnelle relativement à l’implication des personnes déplacées ?
  • Existe-t-il certains aspects particuliers relatifs au genre ou à l’âge qui doivent être pris en compte dans le contexte de la justice transitionnelle ?
  • Les personnes déplacées rencontrent-elles des difficultés pour accéder aux mesures de restitution et de compensation en raison de leurs pratiques sociales traditionnelles ?
  • Les normes et pratiques internationales entravent-elles l’application efficace des normes sociales traditionnelles lorsqu’il s’agit d’engager les personnes déplacées dans les processus de justice transitionnelle ?
  • Quels enseignements pouvons-nous tirer des processus de justice transitionnelle actuels et passés, et dans quelle mesure sont-ils spécifiques au contexte ?
  • Est-il possible de trouver des justifications pour laisser les personnes déplacées en dehors des processus de justice transitionnelle afin de garantir le succès de tels processus, et quelles en seraient les implications pour l’avenir des personnes déplacées ?